Le livre comptable de John Gorham nous amène à une époque bien différente de celle dans laquelle nous vivons. Pour vous aider à découvrir ce livre comptable écrit à la main et à mieux comprendre les informations qu’il contient, nous vous présentons un texte explicatif rédigé par M. John Reid, professeur d’histoire à l’Université Saint Mary’s (Halifax, N.-É.) et spécialiste de l’histoire du Nord-Est de l’Amérique du Nord à l’époque coloniale.
John Gorham, qui fonda et commanda la compagnie des Rangers de Gorham au milieu du dix-huitième siècle, fut un personnage controversé durant sa vie et il l’est encore dans la mémoire historique. Né en 1709, Gorham grandit à Barnstable, une petite ville de la presqu’île du cap Cod au Massachusetts. Il fut commerçant et chef militaire. Ses liens avec certains habitants du cap Cod et la riche entreprise bostonienne de Charles Apthorp et Thomas Hancok jouèrent un rôle essentiel dans les deux aspects de sa vie professionnelle. Jeune homme, il fut surtout, marin, habile chasseur de baleines et capitaine. Il se lança ensuite dans le commerce et la spéculation foncière à différents endroits du Nord-Est de l’Amérique du Nord, y compris à l’île de Sable, mais au début des années 1740, il s’orienta de plus en plus vers une carrière militaire. Avec le début des hostilités entre l’Angleterre et la France durant la guerre de Succession d’Autriche en 1744 (appelée la guerre du roi George dans les colonies anglo-américaines), Gorham leva sa première compagnie de Rangers et la conduisit à Annapolis Royal qui était le siège de l’armée britannique en Nouvelle-Écosse et qui subissait alors l’assaut des forces françaises et de leurs alliés autochtones.
Comme Brian D. Carroll l’a indiqué dans son ouvrage publié en 2012, la majorité des recrues de Gorham n’étaient pas des Mohawks, comme le croyaient certains historiens, mais des chasseurs de baleine indigènes du sud de la Nouvelle-Angleterre, surtout des Wampanoags, qui avaient des liens avec la famille Gorham. Certains étaient des Rangers qui avaient participé aux combats lors de précédents conflits1. Le déploiement de la compagnie à Annapolis Royal eut lieu à la demande du gouverneur du Massachusetts, William Shirley, pour qui le maintien de la présence britannique en Nouvelle-Écosse fut toujours essentiel à la défense de la Nouvelle-Angleterre. Les conséquences de la présence des Rangers de Gorham furent immédiates et contribuèrent à la levée du siège en 1744. Les Rangers de Gorham utilisèrent une force impitoyable pour intimider les Autochtones et la population acadienne comme l’avaient fait d’autres compagnies de Rangers de la Nouvelle-Angleterre soixante-dix ans plus tôt, à l’époque du colonel Benjamin Church sous lequel le grand-père de John Gorham avait servi comme commandant en second. Tuer et scalper l’ennemi étaient essentiels pour arriver à leurs fins. En 1747, Gorham déplora publiquement le retard du paiement des scalps des Mi’kmaq pris par ses Rangers en 1744 et ramenés à Boston pour recevoir la prime en vigueur à ce moment-là pour les scalps et les prisonniers.2
Même à cette époque, Gorham suscitait la controverse dans différents milieux. Il fit une plainte au sujet du paiement de la prime pour les scalps parce que ses Rangers indigènes et leurs familles laissaient entendre qu’il les avait dupés. Durant le siège de Louisbourg, en 1745, Gorham fut l’un des commandants d’une force d’attaque qui échoua dans sa tentative pour prendre une batterie française. On allégua la négligence et l’état d’ébriété de ses troupes. Gorham fut traduit devant un conseil de guerre mais il fut disculpé des charges contre lui. Plus tard, après la fondation d’Halifax en 1749, Gorham se querella avec le nouveau gouverneur de la Nouvelle-Écosse, Edward Cornwallis, pour des questions politiques. Il conserva toutefois sa place au sein du Conseil de la Nouvelle-Écosse auquel il avait été nommé en 1749. Gorham avait de puissants alliés, notamment William Shirley, gouverneur du Massachusetts, et le major Paul Mascarene, administrateur (gouverneur intérimaire) de la Nouvelle-Écosse de 1740 jusqu’à la nomination de Cornwallis. Dans une lettre à Shirley en août 1746, Mascarene loua l’efficacité des Rangers des bois qui réussissaient à fatiguer l’ennemi.3
De 1744 à l’été de 1751, qui fut celui du départ de Gorham pour Londres (où il mourut de la variole plus tard la même année), les Rangers de Gorham s’adonnèrent à deux formes principales de guerre. À partir de goélettes et en utilisant des baleinières pour gagner la rive, ils firent de brèves mais violentes incursions à l’intérieur des terres, se battant contre les forces indigènes et attaquant les établissements. Ils construisirent aussi des fortins à des endroits stratégiques et les défendirent. Plus tard, ils édifièrent le fort Sackville à la tête du bassin de Bedford au nord-ouest d’Halifax. Tout cela se passait à une époque de tensions extrêmes. Après la fin de la guerre du roi George, la discorde non officialisée entre les Anglais et les Français à propos des frontières persista et les tensions furent exacerbées par les actions de missionnaires français belliqueux, dont l’abbé Jean-Louis Le Loutre. Le plus important toutefois fut que les activités des Rangers de Gorham constituèrent l’invasion du territoire appelé Mi’kma’ki par les Britanniques. La violence perpétrée contre les établissements aggrava la provocation causée par la construction de forts, qui fut longtemps considérée comme un instrument à la fois symbolique et pratique de revendication impériale.
Il n’est donc pas surprenant que dans la mémoire historique, Gorham demeure un personnage controversé tout comme il le fut à l’époque. Selon George T. Bates, Gorham fut un personnage remarquable en raison de la grande importance et de la grande valeur de son service pour le bien des intérêts britanniques dans l’histoire de la Nouvelle-Écosse4. Selon Daniel N. Paul, qui, en 1998, s’opposa avec succès à ce que le gouvernement provincial rende hommage à Gorham en donnant son nom à une section de l’autoroute près de Bedford, Gorham fit davantage sa marque comme chef des chasseurs de primes qui méritaient tout à fait leur réputation de tueurs5. Quant à la conclusion modérée de John David Krugler, qui rédigea la biographie de Gorham pour le Dictionary of Canadian Biography, Gorham et sa compagnie de violents Rangers semblent avoir été un élément nécessaire pour maintenir la présence anglaise en Nouvelle-Écosse.6
Toutefois, tout examen de Gorham et de sa carrière ne peut se faire qu’avec les sources primaires accessibles, qui sont limitées et fragmentaires. Des parties de son journal sont connues depuis longtemps, de même que ses entrées sur le siège de Louisbourg et ses note généalogiques qu’il a consignées dans un carnet durant des moments creux du siège7. La bibliothèque William L. Clements de l’Université du Michigan possède un fonds précieux des documents de Gorham, notamment son journal d’une semaine de septembre 1749, de la correspondance entre Gorham et Shirley et des preuves du recrutement des Rangers8. Néanmoins, avec uniquement 24 articles, il s’agit d’un fonds limité. Bien que l’analyse de Carroll sur les Rangers de Gorham montre ce à quoi on peut arriver en réunissant des éléments plus ou moins isolés d’une grande variété de sources, nous ignorons beaucoup de choses de Gorham et de ses activités mercantiles et militaires.
C’est dans ce contexte qu’on se réjouit tant de l’acquisition et de la numérisation par les Archives de la Nouvelle-Écosse du livre comptable de Gorham couvrant la période de 1747 à 1750, qui constitue maintenant le fonds John Gorham. Le livre comptable, un cahier de petite taille ayant 178 pages, dont quelques-unes vierges, vient confirmer bien des choses dans un certaine nombre de domaines importants. Tout d’abord, il faut souligner qu’il s’agit d’un document sans prétention. Une bonne partie du contenu consiste en de longues listes d’articles, tels que des vêtements, des aliments, des armes, des outils, qui furent distribués à des Rangers de Gorham désignés par leur nom. Parce que les entrées ne sont pas toujours en ordre chronologique, il est clair que certaines d’entre elles ont été copiées dans le livre après avoir été inscrites ailleurs. Il est probable aussi que le livre lui-même ait été utilisé comme texte de base pour un rapport plus officiel.
Le livre ne répond donc pas à certaines questions importantes sur Gorham et les Rangers. Par exemple, il ne mentionne pas les primes pour les scalps et les prisonniers. Par conséquent, le document ne nous permet pas de mieux comprendre l’étendue de la pratique dans les compagnies de Rangers en vertu de la proclamation de 1749 de la Nouvelle-Écosse sur les scalps et les prisonniers. À noter que d’autres compagnies de Rangers existèrent après la fondation d’Halifax, notamment celles de Francis Bartelo et de William Clapham9. Aussi, bien que le livre comptable contienne beaucoup de renseignements de nature financière, il reste muet sur la provenance des fonds pour financer la compagnie de Rangers de Gorham. Il est clair que Gorham finança en partie sa compagnie grâce à des subsides coloniales et impériales. Après tout, il détenait un grade dans la force coloniale au Massachusetts et, en 1747, il reçut une commission impériale. Il utilisa aussi d’autres sources de financement, notamment le pillage et les primes.
Des comptes trouvés récemment et portant sur les débuts de la Nouvelle-Écosse contiennent des détails sur les contributions faites par la Province aux Rangers de Gorham à partir de septembre 1753 (la compagnie était alors sous le commandement de Joseph Gorham, le frère de John) et indiquent des remboursements faits à la succession de John Gorham pour les dépenses de la goélette Warren. Toutefois, cela ne nous permet pas de voir quelle était la répartition des fonds fournis par l’État et des fonds provenant de ses entreprises commerciales10. Gorham lui-même s’était plaint vers la fin de 1749 de la complexité de ses affaires et du fait que sa compagnie de Rangers était exclue de tout financement de l’État11, mais en mars 1752, le Board of Trade de la Grande-Bretagne préconisait d’épargner de l’argent en renvoyant toutes les compagnies de Rangers, en particulier celle de Gorham parce qu’elle semblait inefficace12.
Le livre comptable nous offre toutefois de nouveaux points de vue importants sur différents sujets se rapportant surtout aux Rangers de Gorham mais aussi sur d’autres sujets, notamment la tentative de colonisation de l’île de Sable et la complexité des relations entre les Britanniques et les Acadiens. Les listes d’achat et de distribution nous donnent une idée de la culture matérielle dans les armées irrégulières du Nord-Est de l’Amérique du Nord au milieu du dix-huitième siècle. Bien que le livre comptable n’indique pas clairement quels articles furent distribués gratuitement aux Rangers de Gorham et lesquels furent déduits de leur solde, tout un éventail d’articles et de produits est mentionné dans les nombreuses pages consacrées à ces biens dont voici des exemples : des couteaux, des hachettes, des boucles, des chaussures, des chemises, des pantalons, des havresacs, des lignes et des hameçons pour la pêche, du porc, du bœuf, de l’agneau, de la volaille, du riz, du sucre, du rhum, du cidre, des pipes et du tabac.
Les étapes de préparation des expéditions sont aussi clairement indiquées. Beaucoup de travail et de grosses sommes d’argent ont été consacrés à l’enrôlement. Même les mots utilisés par Gorham quand il insiste qu’il a besoin d’hommes braves (p. 24-26) illustrent les traits de caractère nécessaires pour les opérations rapides et sans pitié menées par une compagnie de Rangers. Les travaux de préparation et d’entretien de deux goélettes, Anson et Warren, ainsi que l’acquisition de baleinières sont aussi mentionnés à plusieurs reprises dans les comptes (par exemple, voir la page 11). Parmi les armes de la compagnie, il y a quelques espingoles montées sur des pivots (p. 7, 16, 17), une arme terriblement destructrice dont le nom évoque plutôt quelque chose de délicat.
Le livre mentionne les noms d’un grand nombre de Rangers, certains dont on ne sait rien, d’autres qui sont connus. Par exemple, Jérôme Atecouando, surnommé « Captain Sam », (p. 31), était l’un des Pigwackets qui avaient abandonné l’alliance traditionnelle avec les Français pour s’engager dans la compagnie de Gorham. Les Pigwackets étaient des indigènes de la vallée de la Saco dans le Maine. Jérôme était probablement le fils de l’un des principaux négociateurs de traités abénaquis de la génération précédente appelé Atecouando13. Le plus souvent, par contre, les listes de noms dans le livre comptable confirment qu’avec le temps, le nombre et la proportion de Rangers autochtones avaient décliné, comme l’a observé Carroll. « Captain Sam » déserta en 1750, et des noms celtiques, comme ceux de Mark McCraith (p. 38) et de Micall Sulaven (p. 104), avaient déjà commencé à paraître14. En 1749, selon le chroniqueur et épistolier haligonien John Salusbury, Gorham était toujours le « colonel indien », mais en réalité sa compagnie comptait beaucoup moins d’Autochtones qu’à l’origine15.
Le livre comptable nous donne aussi une idée du réseau commercial de Gorham en Nouvelle-Angleterre, concentré, faut-il le dire, à Barnstable. Durant ses carrières militaire et commerciale, Gorham maintint ses liens avec le cap Cod, qu’il ait s’agi de l’achat de moutons à Barnstable en 1748 (p 2) ou du rôle de son frère, le capitaine David Gorham, dans l’enrôlement et les affaires dans la région de Barnstable (p 4). À Boston, il fit des affaires avec la famille Sturgis à laquelle il était lié par alliance et avec laquelle il avait des connaissances en commun à Barnstable. (page 33). Mais, à Boston, c’est avec l’entreprise « Apthorp and Hancock » qu’il fit affaire le plus souvent. Les transactions avec cette entreprise sont omniprésentes dans le livre comptable et montrent l’intérêt indéniable que Thomas Hancock eut pendant longtemps pour le Nord-Est, en fait jusqu’à Louisbourg et en Nouvelle-Écosse16.
Apthorp et Hancock, ces deux riches marchands, étaient aussi très engagés avec Gorham dans une tentative pour coloniser l’île de Sable, tentative qui fut un échec sur le plan humain mais qui amena des chevaux sur l’île. Les références à l’île de Sable dans le livre comptable sont peu nombreuses mais révélatrices. Une entrée faite en 1747 mentionne un étalon de sept ans, des juments poulinières, la naissance de plusieurs poulains (page 1) et la présence d’autres animaux domestiques. Bien que les ancêtres de la population actuelle de chevaux sur l’île aient vraisemblablement été des chevaux acadiens envoyés par Hancock sur l’île environ une dizaine d’années plus tard, durant le Grand Dérangement, le livre comptable nous donne toutefois des détails intrigants pour comprendre le projet de l’île de Sable dans son ensemble17.
Les entrées relatives aux transactions commerciales entre les Rangers de Gorham et les Acadiens sont fréquentes elles aussi. Cela peut sembler surprenant parce que les établissements acadiens avaient de bonnes raisons de craindre les attaques des Rangers comme à l’époque de Benjamin Church18. Cependant, l’histoire acadienne, et surtout les relations commerciales entre les Acadiens et les gens de la Nouvelle-Angleterre, étaient à tout le moins complexes. Par conséquent, l’évidence de transactions avec des Acadiens, notamment Antoine Landry (page 34), Francis Leblong (sic, page 39), Thomas Doyron (page 142), « John Le Blong the ffrench man » (page 145), Jean-Baptiste Landry (page 158), Silvan Leblanc (page 164) et bien d’autres, peut être vue comme la continuation de la longue tradition acadienne (relevée il y a quelques années par Jean Daigle) de considérer les gens de la Nouvelle-Angleterre comme « nos amis les ennemis »19.
En plus de ces principaux thèmes, le livre comptable fournit beaucoup de détails. Il contient en commençant par la fin un autre fragment du journal de Gorham qui parle d’une série de débarquements effectués par les Rangers de Gorham dans le bassin des Mines sur une période de cinq jours en août 1748 et d’une série d’échauffourées avec un petit groupe d’Autochtones (page 178). Il y a aussi une copie de deux lettres complètes, datées toutes deux du 15 juillet 1748 et adressées toutes deux au sergent William Bassett, qui expliquent la procédure et les modalités de l’enrôlement. Ici et là dans le document, il y a des références aux différentes sortes de monnaies qui circulaient en Nouvelle-Angleterre et en Nouvelle-Écosse au milieu du dix-huitième siècle. Différents émissions de la livre du Massachusetts coexistaient avec la livre sterling et il y avait plusieurs appellations pour les pièces espagnoles : dollars, piastres, pièces de huit et réaux20. Parfois, des dispositions étaient prises pour avancer de l’argent aux familles des Rangers. En novembre 1748, un paiement en argent de 15 livres a été fait au nom de Joshua Newcombe à sa femme Hannah Newcombe (page 68); et en février 1749, une somme de 2 livres a été remise à la femme d’Abraham Spurr avec du tissu pour se faire une chemise (page 77). Pour une raison inexpliquée, il y a à la page 90 l’ébauche d’une carte qui semble être celle d’un endroit près du passage Lennox au Cap-Breton. Une mention fascinante à « son nègre » (page 6) laisse entendre que Gorham possédait un esclave21.
Ce dernier aspect nous rappelle comment il faut lire ce livre comptable. Une bonne partie du contenu est prosaïque et des entrées comme celle qui fait allusion à la confection d’une chemise par Sara Spurr ou à l’acquisition d’un violon par trois Rangers (page 30) peuvent laisser croire à un réel manque de sérieux. Toutefois, il ne faut jamais oublier que c’était la vie dans la région de l’Atlantique du milieu du 18e siècle et de l’un de ses théâtres les plus violents. C’était un monde d’esclavage, de constantes migrations forcées et d’attaques dans les territoires autochtones et contre les habitants. Il s’agissait non seulement d’empiètements militaires mais aussi de changements environnementaux causés par l’agriculture, ce qui était encore plus désastreux. Les combattants indigènes, comme ceux de la compagnie des Rangers de Gorham, se battaient entre eux en s’associant à des forces impériales, un phénomène bien connu dans les régions celtiques des îles britanniques, ce qui témoigne de l’influence impériale22.
John Gorham était un produit de son époque tout en étant un produit de la grande tradition de gens de la Nouvelle-Angleterre qui poursuivirent des intérêts militaires et commerciaux en Acadie et en Nouvelle-Écosse. Sa compagnie de Rangers, qui contribua à l’invasion britannique de la Mi’kma’ki, connut beaucoup de succès localement, comme le reconnurent clairement de hauts personnages associés à cette invasion, notamment Mascarene et Shirley. Cependant, l’invasion britannique dans un sens plus large resta au point mort et ne prit de l’ampleur qu’avec la colonisation à une plus grande échelle et le changement environnemental rapide qui résultèrent de l’arrivée des loyalistes dans les années 1780. Par conséquent, l’opinion plus sceptique du Board of Trade quant à l’importance des Rangers de Gorham était elle aussi valide. Malgré son importance encore plus grande, le conflit des empires est en grande partie absent du livre comptable et la violence extrême des opérations des Rangers n’est mentionnée que vaguement et de façon intermittente. Il s’agit néanmoins du contexte incontournable de cet important document.
1 Brian D. Carroll, « “Savages” in the Service of Empire: Native American Soldiers in Gorham’s Rangers, 1744-1762, » New England Quarterly, 85:3 (Septembre 2012), p. 383-429, surtout 392-394. Cette ébauche biographique est basée en grande partie sur le texte de John David Krugler, « John Gorham » pour le Dictionary of Canadian Biography (DCB), http://www.biographi.ca/en/bio/gorham_john_3E.html, et l’ouvrage de Carroll, « “Savages” in the Service of Empire ». Pour certains aspects, l’article de George T. Bates, « John Gorham, 1709-1751: An Outline of his Activities in Nova Scotia, 1744-1751 », Collections of the Nova Scotia Historical Society, 30 (1954), p. 27-77, a été utile malgré des descriptions extrêmement stéréotypées des soldats indigènes et des gens ainsi que des références inégales pour les points essentiels. Le texte de John Grenier, The First Way of War: American War Making on the Frontier, 1607-1814 (Cambridge: Cambridge University Press, 2005), surtout les pages 66 à 83, et les passages pertinents de son livre The Far Reaches of Empire: War in Nova Scotia, 1710-1760 (Norman: University of Oklahoma Press, 2008), constituent une analyse récente et révélatrice de l’importance militaire de Gorham. Deux ouvrages de Geoffrey Plank sont également importants : An Unsettled Conquest: The British Campaign Against the Peoples of Acadia (Philadelphia: University of Pennsylvania Press, 2001), et Rebellion and Savagery: The Jacobite Rising of 1745 and the British Empire (Philadelphia: University of Pennsylvania Press, 2006). Je remercie Dan Conlin, Martin Hubley, Zoe Lucas et Kevin Robins pour leurs précieux conseils durant la préparation de cette introduction.
2 Carroll, « “Savages” in the Service of Empire », p. 406-407. Lire le texte de Stephen Brumwell, Redcoats: The British Soldier and War in the Americas, 1755-1763 (Cambridge: Cambridge University Press, 2002), p. 211-215 sur l’utilisation plus générale des Rangers par les Britanniques. Pour lire sur les primes offertes par le Massachusetts pour le scalp des Mi’kmaq et des Malécites et pour les prisonniers, voir le texte de Daniel R. Mandell, éditeur, New England Treaties, North and West, 1650-1776, vol. XX de l’ouvrage Early American Indian Documents: Treaties and Laws, 1607-1789, Alden T. Vaughan, éditeur général (Washington, DC: University Publications of America, 2003), p. 458. Les autorités françaises offraient aussi des primes pour le scalp des Britanniques; lire le texte de Geoffrey Plank, « The Two Majors Cope: The Boundaries of Nationality in Mid-18th Century Nova Scotia », Acadiensis, vol. 25, no 2 (Spring 1996), p. 32.
3 Lettre de Mascarene à Shirley, le 20 août 1746, dans l’ouvrage de Charles Henry Lincoln, éditeur, Correspondence of William Shirley, Governor of Massachusetts and Military Commander in North America, 1731-1760 (2 volumes; New York: Macmillan, 1912), I, p. 339.
4 Bates, « John Gorham, 1709-1751, » p. 77.
5 Daniel N. Paul, We Were Not the Savages: A Mi’kmaq Perspective on the Collision between European and Native American Civilizations (2nd ed.; Halifax: Fernwood Publishing, 2000), p. 103, 149.
6 Krugler, « John Gorham », DCB.
7 Voir Frank William Sprague, éditeur., Col. John Gorham’s “Wast Book”: Facsimiles (Boston: David Clapp, 1898), à http://ia701200.us.archive.org/24/items/cihm_54599/cihm_54599.pdf (consulté le 16 septembre 2013).
8 « John Gorham Papers, 1744-1772 », Bibliothèque William L. Clements, Université du Michigan. Quelques documents au sujet de Gorham se trouvent dans la section Admiralty and Treasury Papers des archives nationales du Royaume-Uni (United Kingdom National Archives (UKNA)). Gorham est aussi mentionné dans les volumes pertinents de la série CO 217 de la correspondance coloniale et dans la correspondance d’autres personnages importants comme William Shirley.
9 L’allusion aux rapports selon lesquels les Rangers apportaient des scalps d’Acadiens et d’Indigènes concerne clairement l’époque de la déportation des Acadiens et a été faite environ 30 ans après les événements décrits; lettre de Hugh Graham écrite en 1791 et citée dans le texte de John Knox, An Historical Journal of the Campaigns in North America for the Years 1757, 1758, 1759, and 1760 édité par Arthur G. Doughty (3 volumes; Toronto: The Champlain Society, 1914-16), p. 196-197.
10 Consulter le fonds « General James Grant of Ballindalloch » aux archives nationales de l’Écosse (National Archives of Scotland) GD 494/1/31, p. 4-10, 12, 14-15. Les Archives de l’Université Saint Mary’s ont un microfilm de ce fonds documentaire. Pour les buts économiques personnels de Gorham, lire l’article de Grenier, The First Way of War, p. 69-70.
11 Lettre de John Gorham, novembre [1749], Gorham Papers, Bibliothèque Clements.
12 Lettre du Board of Trade à Edward Cornwallis datée du 6 mars 1752,UKNA, CO218/4, f. 68. John Gorham était déjà mort à cette date mais sa compagnie existait toujours sous le commandement de son frère Joseph.
13 Carroll, « “Savages” in the Service of Empire », p. 395.
14 Carroll, « “Savages” in the Service of Empire », p. 415-416.
15 Ronald Rompkey, éditeur, Expeditions of Honour: The Journal of John Salusbury in Halifax, Nova Scotia, 1749-53 (2nd ed.; Montreal and Kingston: McGill-Queen’s University Press, 2011), p. 141.
16 Voir Julian Gwyn, Excessive Expectations: Maritime Commerce and the Economic Development of Nova Scotia, 1740-1870 (Montreal and Kingston: McGill-Queen’s University Press, 1998), p. 17-18; aussi, George A. Rawlyk, Nova Scotia’s Massachusetts (Montreal and London: McGill-Queen’s University Press, 1973), p. 195 et 198.
17 Voir Barbara Christie, The Horses of Sable Island (Lawrencetown Beach: Pottersfield Press, 1995), surtout les pages 19 à 25; Musée d’histoire naturelle de la Nouvelle-Écosse, http://epe.lac-bac.gc.ca/100/205/301/ic/cdc/sableisland/english_en/nature_na/horses_ho/horses-came_ho.htm (consulté le 3 septembre 2013).
18 Pour les raisons de Gorham d’utiliser la force contre les Acadiens, voir Grenier, The First Way of War, p. 80-81.
19 Jean Daigle, « Nos amis les ennemis: Relations commerciales de l’Acadie avec le Massachusetts » (Thèse de doctorat, Université du Maine, 1975).
20 Pour en savoir plus sur ce sujet complexe, voir Julian Gwyn, « Financial Revolution in Massachusetts: Public Credit and Taxation, 1692-1774 », Histoire sociale/Social History, 17 (1984), surtout les pages 64-67 et 74-75.
21 Une entrée faite à Barnstable le 11 février 1746 (probablement 1746-1747) se lit : « Cesar Negro and Mercy Daniel Indian, Servts to John Gorham Esqr ». Leonard H. Smith et Norma Helen Smith, éditeurs, Vital records of the Towns of Barnstable and Sandwich (Baltimore, MD: Genealogical Publishing Company, 1982), p. 165. Il est aussi fait mention de Cesar aux pages 13, 82 et 84. Bien que le mot servant (serviteur) puisse décrire différents status, de l’esclavage à d’autres formes de servitude, le contexte suggère que Cesar était un esclave. L’entrée dans le livre de compte est une réclamation par Gorham des gages de son « Neagr » et indique de Gorham avait le droit de les réclamer compte tenu du statut de son serviteur.
22 Voir Wayne E. Lee, « Subjects, Clients, Allies, or Mercenaries? The British Use of Irish and Amerindian Military Power, 1500-1800 », dans H.V. Bowen, Elizabeth Mancke et John G. Reid, éditeurs, Britain’s Oceanic Empire: Atlantic and Indian Ocean Worlds, c. 1550 –1850 (Cambridge: Cambridge University Press, 2012), p. 179-217.Que le phénomène n’ait pas été unique à l’empire britannique est clairement expliqué dans les essais de l’ouvrage de Wayne E. Lee, éditeur, Empire and Indigenes: Intercultural Alliance, Imperial Expansion, and Warfare in the Early Modern World (New York: New York University Press, 2011).
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